Le 1er décembre les partis socialistes et sociaux-démocrates européens ont adopté à Madrid le Manifesto du PSE.
Les socialistes ont immédiatement présenté ce texte comme une avancée de gauche :
- « Le Manifesto ne se contente pas de quelques mesures de régulation face à la crise »
- « il propose aux Européens l'espoir d'un nouveau modèle dans lequel l'économique prend le pas sur le financier »
- « Il propose de nombreuses solutions concrètes en faveur de l'Europe sociale » (Martine Aubry le 1er décembre 2008)
- «Avec le "manifesto" qui prévoit un revenu minimum européen, on peut sans complexe faire une campagne de gauche sur l'Europe» (Razzy Hammadi, proche de Benoît Hamon, dans Libération 15 janvier 2009)
Cela restait à vérifier concrètement, d’autant que le fameux Manifesto n’a d’abord été disponible qu’en anglais.
Une traduction française, présentée alors comme « provisoire » n’est apparue sur les sites socialistes qu’entre les fêtes de fin d’année, c'est-à-dire plus d’un mois après. Cette traduction réserve d’énormes surprises car elle déforme lourdement le texte original du Manifesto en inventant parfois de toutes pièces certaines formulations sociales et plus à gauche. Depuis la mi-janvier, nouvelle entourloupe, la traduction française diffusée en ligne n’est d’ailleurs même plus présentée comme « provisoire » …
Les plus gros mensonges de la traduction française du Manifesto :
· là où le Manifesto se réclame de l’action des « partis progressistes de gauche et de centre-gauche au pouvoir », la traduction française escamote le « centre gauche » et ne parle que de « partis de gauche »
· là où le Manifesto appelle à « tirer le meilleur profit des opportunités qu’offre la mondialisation » comme le ferait n’importe quel libéral, la traduction française fait l’impasse sur la « mondialisation » et parle juste de « saisir les possibilités nouvelles d’un monde ouvert »
· là où le Manifesto écrit de manière très générale et floue que « le processus de libéralisation doit être évalué », la traduction française affirme que « les politiques de libéralisation déjà adoptées doivent faire l’objet d’une évaluation sociale », ce qui n’est plus du tout la même chose.
· là où le Manifesto défend « des salaires minimum décents dans tous les Etats-membres », la traduction française propose « l’établissement d’un salaire minimum décent dans tous les Etats membres » … On fait ainsi croire que le Manifesto propose un salaire minimum européen, alors que ce n’est nullement le cas !
· là où le Manifesto propose de « travailler à promouvoir des horaires de travail décents », la traduction française prétend carrément « agir pour la fixation d’une durée maximale de travail décente », ce qui à nouveau n’est absolument pas la même proposition.
Quelques autres mesures libérales et atlantistes du Manifesto :
- « il faut parachever le marché intérieur européen – et réduire les formalités imposées aux entreprises »
- « construire un partenariat transatlantique fort »
- « La nouvelle initiative européenne de défense doit être développée en coordination avec l’Otan »
L’alignement sur le Traité de Lisbonne contre l’avis des peuples
Le Manifesto du PSE défend « l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne », alors même que le peuple irlandais l’a rejeté par référendum et que les peuples français et hollandais avait déjà rejeté sa copie conforme la Constitution européenne.
Quelques citations ...
n François Hollande le 21 octobre 2008 sur RTL : « quand nos engagements européens sont en cause, il n'y a plus de clivages politiques qui demeurent ».
n Martine Aubry lors du point de presse au Conseil national du PS le 25 novembre 2008 : « L’Europe est un projet pour la gauche en soi »
n Jacques Delors en 1992 quelques jours avant le référendum sur Maastricht : « Votez oui à Maastricht, et on se remettra au travail tout de suite sur l'Europe sociale »