Selon l’INSEE, divine surprise, la croissance du PIB rebondit au deuxième trimestre 2013 : + 0,5 % (voir l’analyse de l’INSEE ci-dessous).Globalement, pour la zone euro, la hausse du PIB est de + 0,3 %, et atteint 0,7 % en Allemagne. Aussitôt, l’information fait la une des grands médias et les choux gras de nos gouvernants Après F. Hollande, J.M. Ayrault en rajoute une couche : « Ne croyez pas que les bons chiffres du deuxième trimestre soient dus au hasard, mais aux capacités de notre économie, de notre appareil productif, à notre politique et aux orientations nouvelles entamées en Europe. ».
Les raisons de ce rebond : d’abord une consommation conjoncturelle.
« Les dépenses de consommation des ménages accélèrent (+0,4 % après –0,1 %) », mais « La formation brute de capital fixe (FBCF) totale diminue de nouveau » écrit l’Insee. En clair ce sont les dépenses des ménages, des familles qui tirent la croissance, alors que les entreprises diminuent leurs investissements (appelés « formation brute de capital fixe », du moins… en France ! Elles préfèrent investir dans la …finance ou à l’étranger pour faire plus de profits, y compris en bénéficiant toujours des paradis fiscaux. Or « une reprise ne peut être durable que s’il y a de l’investissement. Or, il n’y en a pas aujourd’hui » affirme l’économiste Eric Heyer, de l’Observatoire français des conjonctures économiques.
« Les dépenses d’énergie restent dynamiques (+2,4 % après +2,0 %), favorisées par des températures de nouveau inférieures aux normales saisonnières au printemps. Les dépenses en automobiles se reprennent (+2,1 % après –5,5 %) pour la première fois depuis fin 2011. En revanche, les achats d’habillement baissent de nouveau (–2,4 % après –2,2 %) et les dépenses en alimentation se replient (–1,2 % après +1,0 %) » analyse l’Insee. Ainsi, les mauvaises conditions météorologiques (le froid du printemps) ont poussé à une plus forte consommation de fuel de chauffage, de gaz ou d’électricité, gonflant les factures énergétiques. Mais cela ne constitue pas une évolution durable, permanente. Quand à la vente des voitures, il faut remarquer que nombre de ménages ont retardé l’échéance de l’achat d’un nouveau véhicule et font cet achat aujourd’hui, bénéficiant de réductions importantes des vendeurs. Mais cela durera-t-il et atteindra-t-il les niveaux de 2011 ? Rien n’est sûr.
Et une reconstitution des stocks de produits finis, en particulier de véhicules
« Les variations de stocks des entreprises contribuent de nouveau positivement à la croissance du PIB (+0,2 point, après +0,1 point au premier trimestre). Cela concerne en particulier les matériels de transports ». A force de réduire la production, de réduire les stocks, ceux-ci deviennent trop limités, doivent être renouvelés. Phénomène la encore conjoncturel, qui risque de na pas durer, si la consommation des ménages ne se maintient pas.
Le contexte européen un peu plus favorable est un facteur qui booste les exportations, mais la aussi pour combien de temps, avec les politiques d’austérité, si celles-ci ne sont pas remises en cause ?
Le chômage lui continue d’augmenter et l’Insee prévoit sa progression en 2014
Il s’agit d’une croissance en fait bien limitée, sans investissement, nous l’avons souligné déjà, et sans emplois. La France a continué a détruire27 800 emplois sur la même période, contre 8.300 les trois mois précédents.
Quant à la consommation, elle risque bien de ne pas durablement augmenter compte-tenu de la réduction du pouvoir d’achat, voire d’une éventuelle hausse de la CSG pour « équilibrer »les retraites, alors qu’elle a surtout été liée à l’alourdissement de la facture énergétique d’un printemps froid.
Un changement de cap politique est nécessaire
Car il n’y a pas de quoi pavoiser, F. Hollande. C’est bien d’une autre politique que la France et l’Europe ont besoin, une politique de relance qui mise sur l’augmentation des salaires, du pouvoir d’achat et sur les services publics. Dans notre pays, un salarié sur deux vit avec moins de 1.500 euros par mois et la pauvreté s’étend.
Et pourquoi ne pas "s'attaquer à la finance, cet ennemi" que dénonçait le candidat F. Hollande lors de son grand meeting électoral avant... le premier tour des présidentielles, en mettant à contribution les revenus financiers des entreprises, en particulier les dividendes des actionnaires, par une taxation au même niveau que les salaires. Pourquoi ne pas mettre à plat les 200 milliards d'euros d'aide versésaux entreprises, sans aucun contrôle, sans aucune contrepartie en matière d'emploi, de formation et d'investissement productif ?
Henri Moulinier
Le 16 août 2013
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L’analyse de l’INSEE :
Au deuxième trimestre 2013, le PIB rebondit (+0,5 %)
Au deuxième trimestre 2013, le PIB en volume* augmente de 0,5 % après un recul de 0,2 % chacun des deux trimestres précédents. C’est la plus forte hausse depuis le premier trimestre 2011. L’acquis de croissance annuelle à mi-année est de +0,1 %.
Les dépenses de consommation des ménages accélèrent (+0,4 % après –0,1 %). La formation brute de capital fixe (FBCF) totale diminue de nouveau, mais moins fortement qu’en début d’année (–0,5 % après –1,0 %). Au total, la demande intérieure finale (hors stocks) contribue nettement à l’accélération du PIB : +0,3 point au deuxième trimestre, après –0,1 point au trimestre précédent.
Les exportations (+2,0 % après –0,5 %) et les importations (+1,9 % après +0,1 %) rebondissent de conserve. En conséquence, le solde extérieur a une contribution comptable nulle sur la croissance du PIB ce trimestre (après –0,2 point).
Les variations de stocks des entreprises contribuent de nouveau positivement à la croissance de l’activité : +0,2 point, après +0,1 point au premier trimestre 2013.
La production est à nouveau dynamique
Au deuxième trimestre 2013, la production totale de biens et services accélère vivement : +0,9 % après 0,0 %. La production de biens manufacturés se redresse (+2,0 % après +0,2 %), portée par le rebond de la production de matériels de transport (+8,2 % après –1,0 %), notamment dans les industries automobile et aéronautique. L’activité progresse dans toutes les autres branches manufacturières. La production de services marchands accélère également (+0,7 % après 0,0 %), notamment dans les services aux entreprises.
La consommation des ménages accélère
Au deuxième trimestre 2013, les dépenses de consommation des ménages augmentent à nouveau (+0,4 % après –0,1 %). Les dépenses d’énergie restent dynamiques (+2,4 % après +2,0 %), favorisées par des températures de nouveau inférieures aux normales saisonnières au printemps. Les dépenses en automobiles se reprennent (+2,1 % après –5,5 %) pour la première fois depuis fin 2011. En revanche, les achats d’habillement baissent de nouveau (–2,4 % après –2,2 %) et les dépenses en alimentation se replient (–1,2 % après +1,0 %). Du côté des services, la consommation accélère modérément (+0,3 % après –0,1 %), avec notamment une reprise des dépenses en hébergement-restauration.
L’investissement recule moins fortement
Après quatre trimestres de repli en 2012 et un net recul début 2013 (–1,0 %), la FBCF diminue plus modérément au deuxième trimestre (–0,5 %). L’investissement des entreprises non financières est quasi stable (–0,1 % après –0,9 %). En particulier, leurs dépenses en services se redressent (+0,4 % après –0,6 %). La FBCF des administrations publiques se stabilise également (+0,1 % après –0,6 %). En revanche l’investissement des ménages diminue de nouveau nettement (–1,7 % après –1,4 %), notamment leurs dépenses en logement.
Les échanges extérieurs rebondissent
Au deuxième trimestre 2013, les importations accélèrent (+1,9 % après +0,1 % début 2013), de même que les exportations (+2,0 % après –0,5%). L’accélération des échanges concerne quasiment tous les grands postes de biens, plus particulièrement les achats et ventes de matériels de transports. La contribution comptable du commerce extérieur à la hausse de l’activité est au total neutre ce trimestre, après –0,2 point au premier trimestre.
Les variations de stocks contribuent positivement à la croissance
Les variations de stocks des entreprises contribuent de nouveau positivement à la croissance du PIB (+0,2 point, après +0,1 point au premier trimestre). Cela concerne en particulier les matériels de transports.