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20 juin 2013 4 20 /06 /juin /2013 06:41
Avertissement. Ceci est une fable où, comme La Fontaine dont on boirait bien l’'eau, on ne va pas se gêner pour animaliser les comportements des peuplades françaises.
 Au risque que la sensiblerie épidermique des concernés se prenne la fouettée et que, cul rougi, ils aillent grommelant que c’'est faire injure à leur humaine nature que d'’ainsi les rabaisser à leur bêtise plus constituée que constitutive. Allons, tant pis ! Qu'’ils grognent, braient ou tremblent en feuilles mortes, le droit à la caricature s’'exercera sans faiblir.

Argument. Notre gouvernement de gauche s’'en prend à l’'âge de la retraite et veut le reculer. Pourquoi pas ? Les populations vieillissent en bonne santé et il n’y pas de raisons que les baby boomers qui pètent la forme continuent à se gaver quand leurs petits-enfants peinent à entrer dans la carrière.

L'’ennui, c’est que cette atomisation d'un progrès social fatigué semble découler d’'une stricte pensée comptable. Le désastre, c’'est qu’il y a coalition des avidités, des renoncements et des peurs pour sédimenter l’'encéphalogramme plat des réflexions sur le partage du temps de travail et sur l’'entremêlement des trois temps de la vie (formation, production, loisirs).

Proposition. En France, le chômage dépasse les 10% et le désoeœuvrement des jeunes flirte avec les 25%. Et c'’est dans ce pays que l'’on voudrait maintenir ad vitam les seniors dans l’'emploi et confiner ad nauseam les jeunes adultes dans un statut de dépendance puérile ?

C'’est ridicule, pour ne pas dire criminel. Il faut au contraire que la gauche, si elle existe encore, reprenne la marche en avant de la réduction choisie du temps de travail. Après les 35 heures, il faut passer à la semaine de 4 jours. Au-delà du contrat de génération que Hollande peine à mettre en oeœuvre, il faut instaurer la retraite à la carte. Il s'’agit de travailler moins pour travailler tous, afin de restaurer un contrat social en charpie.

C’'est tout à fait possible sans rien perdre de cette sacro-sainte compétitivité que vénèrent tant nos excellences agenouillées devant le veau d'’or du capitalisme financier. Lisez Pierre Larrouturou (1), dernier des Mohicans à croire encore possible une embellie sociale quand les nuées économiques font se pâmer les gorets, reculer les ânes et frissonner les trembleurs.

Les gorets. Ils ne pensent qu’à leur panse. Ils sont mondiaux et décomplexés, offshore et optimisés. Pour assurer leurs vieux jours, ils n’ont jamais compté sur un Etat-nation qu’ils se sont acharnés à dépecer. Ils savent comment mettre leurs avoirs à l’abri. Et sont juridiquement outillés pour les transmettre au mieux à leurs ayants droit.

Indécrottables, nos gorets pas gênés s’acharnent à faire honte aux RMistes, de leur paresse congénitale. Sentencieux, ils reprochent aux demandeurs d’'emploi leur refus de se retrousser les manches à n'’importe quelle condition. Méprisants, ils pointent l'’égoïsme des

classes 
moyennes, devant les «nécessaires» sacrifices.

 

Pleine aux as, cette corporation charcutière est surtout faite de petits et grands patrons, de professions libérales et de commerçants fortunés, d’'héritiers divers et variés. Le pire, c'’est que sa goinfrerie sans frein fait envie. D’'autant qu'’elle s'’est trouvé des porte-voix «culturels» tels Gérard Depardieu et Johnny Hallyday, assez popus pour entretenir l'’illusion d’une rébellion gauloise, d’'une fronde à la Gavroche.

Les ânes. Il y a l’'âne bâté de droite qui porte la charge de ses donneurs d’'ordre et qui ressasse qu'’il faut travailler plus pour gagner plus, tout en pensant bien fort qu'’il faut travailler plus pour gagner moins.

Et puis, il y a l’'âne de gauche qui recule, qui n'’a pas la franchise de reconnaître qu’'il a abjuré ses ambitions égalitaires. C’est un âne pas très franc du collier, prêt à céder sur beaucoup, de crainte de voir toute la cargaison verser dans le ravin. Entendons-nous bien ! Les politiques ne sont pas seuls à braire à la mort de l’'imagination sociale. Les syndicalistes, les associatifs, les intellectuels, eux aussi, ont mis genou à terre, en ânes déculottés qui fanent leurs espoirs à la mangeoire de la pensée.

Les trembleurs. Ceux qui grelottent en regardant l’'horizon qui noircit à foison, c'’est vous, c’est moi. Tous, nous courbons l'’échine dans l'’attente du knout libéral. On attend que ça nous dégringole sur le râble, trop content d’'être encore salarié en CDI, pensant à compléter notre pension menacée, activant nos maigres réseaux pour pistonner nos gamins sans perspectives.

Nous sommes ces trembleurs, qui refusons de comprendre que la préférence française pour le chômage est une ruse de la raison capitaliste pour nous faire tenir tranquilles. Il ne tient qu’à nous, pauvres pommes, de profiter ensemble des gains de productivité générés par la robotisation et le numérique, au lieu de laisser les actionnaires s’'en pourlécher.

L'’angoisse nous corrode le cerveau quand il faudrait balayer au seuil de nos peurs.

Libération - 17 juin 2013  - Par LUC LE VAILLANT

(1) «La gauche n’a plus le droit à l’'erreur», Michel Rocard et Pierre Larrouturou (Flammarion).

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  • henri Moulinier
  • Adjoint au maire honoraire de La Rochelle. Ancien professeur de lycée en S.E.S. et chargé de cours d'éco Université de La Rochelle. Docteur en histoire. Militant LDH La Rochelle.
  • Adjoint au maire honoraire de La Rochelle. Ancien professeur de lycée en S.E.S. et chargé de cours d'éco Université de La Rochelle. Docteur en histoire. Militant LDH La Rochelle.

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